mardi 4 novembre 2014

Tout vient à point, à qui sait attendre ...SAMBA - Eric Toledano et Olivier Nakache

A défaut de lectures inspirantes ces derniers temps, m'est venue l'envie de vous faire partager mon humble sentiment sur le film de cette post-rentrée, SAMBA, ou les tribulations d'un sans-papier qui, au terme d'un chemin pavé de ronces et de bonnes intentions, trouvera carte d'identité, amour et travail sous les ors de la république...

Allez, soyons franc, ce film vu en famille au milieu d'un public acquis d'avance s'est révélé plaisant. On sort détendu, soulagé par la bonne fortune finale de notre héros, regonflé dans notre confiance en l'homme, un doux sentiments de fraternité flottant dans l'air...un peu de tiédeur dans ce monde de brutes ne nuit pas.

Passé ce premier effet lénifiant, le retour à la réalité engendre une pensée un peu moins amène. Car au fond, qui est ce SAMBA qui suscite notre empathie et dont l'histoire s'écrit en creux de celle de l'autre, ce méchant, cet antihéros dont on ne retient même pas le nom et qui finira noyé à la fin de l'histoire.
Quelle leçon est-il censé nous donner?

La voici

Chers concitoyens, si dans la course à la performance, vous pensez qu'on attend de vous
- d'avoir de l'assurance, du leadership, d'anticiper
- d'être sportif, combatif, énergique dans votre travail et vos relations (à ne pas négliger),
- de ne pas vous laisser marcher sur les pieds,
- de savoir bousculer les codes pour faire bouger les lignes mais pas trop,
- de provoquer les événements au lieu de les subir.

Vous avez raison. C'est ce qu'on attend de vous et l'Alice du film, chasseuse de tête dans un cabinet de recrutement, dépressive au stade ou nous la rencontrons mais qui ne saurait tarder à reprendre rapidement du poil de la bête vous le confirmera (en témoigne son sourire carnassier à la fin devant trois jeunes mâles terrorisés).

Cependant, le sans-papier candidat à la régularisation (ou pas d'ailleurs) se gardera bien de manifester trop vite de telles ardeurs.
La France pour tous, c'est autre chose.
La France pour tous, ça se mérite.

Pour mériter notre affection et notre porte ouverte, il lui conviendra de nous la jouer profil bas et de nous démontrer :
- qu'il est capable de raser les murs, de fuir les gares, les quais de métro, les sorties nocturnes, de rentrer avant le couvre feu et ce pendant au moins 10 ans,
- que pendant ce laps de temps, il sera à même de se contenter de la compagnie régulière de dames âgées, voire légèrement séniles, avec qui il pourra partager quelques soirées festives modérément arrosées et très chastes, Et que, par conséquent, il saura éviter la femme blanche (décrite supra), sportive, performante, battante  qui d'ailleurs ne lui trouvera rien sauf à être dépressive (souhaitons que l'idylle dure quand l'ego se réveillera...)
-  qu'il peut supporter calmement et avec un certain détachement, voir fatalisme, l'enfermement dans des centres de rétention glauques et insalubres.
Une patience infinie, une modestie toujours à l'oeuvre, une absolue soumission à sa triste condition seront donc toujours à rechercher.

Et si la potion est trop amère, tant pis.
Point de rébellion, de révolte stérile, de cris, de plaintes et de gémissements. Point de désir trop pressant, point d'émotions trop vives.
Bref, point d'impatience !

Regardez le méchant sans papier qui s'est noyé, à trop vouloir tout tout de suite, il n'aura rien !

La morale de la fable,
A tout bon sans-papier si docile et si gentil,
tout vient à point à qui sait attendre...