mercredi 30 octobre 2013

Boisé... La délégation norvégienne - Hugo Boris

Acte 1
Ce qui a été rédige aux deux tiers du livre...

Un titre aguicheur comme un avis de commission européenne, une première de couverture illustrée d'un dessin triste aux couleurs sales, une thématique chasseresse étroite et désuète...la fuite s'imposait.

Et pourtant , tel un chien de sang, suivant mon instinct de lectrice aguerrie, j'ai flairé la piste prometteuse de ce petit roman malicieux... Une bonne prise, assurément.

Si on ajoute que la traque du gibier me fait horreur, que j'ai cependant beaucoup pratiqué, enfant, la pêche à la ligne avec mon père où j'ai appris à observer et à aimer la nature, ceci expliquant peut être cela, cette fascination répulsion pour ce récit qui est aussi un hommage à l'impétueuse beauté de cette forêt dont j'ignorais tout.

Le pitch : Un huis clos entre chasseurs dans un gîte au fin fond d'une sombre forêt norvégienne engourdie peu à peu dans le glacial hiver boréal...

Puissante écriture rythmée, émaillée de références cynégétiques qui, loin d'agacer, contribuent à installer un décor hitchcockien. Entre repère de chasse plus pittoresque que nature et forêt noire immobile et inquiétante, les personnages contrastés, hauts en couleur se jaugent, s'affrontent et se débattent au fil d'une intrigue prometteuse.

Acte 2
Sur le tiers restant ...

Las ...le doute s'insinue. la catharsis tarde, les errances dans la forêt se prolongent, nos héros tournent en rond comme le récit.
A cours et pressé d'en finir, notre auteur précipite la chute dans un final fantastique et onirique aussi radical qu'incongru.

Dommage, on était chauffé à blanc, on est déçu.

Acte 3
Il sera beaucoup pardonné à Hugo Boris. Écrit à l'âge de 28 ans, ce livre a les défauts de sa jeunesse, brillant, un peu faible sur le fond. Il nous confirme que le génie étant rare, la maturité d'un écrivain s'acquiert à l'exercice, toujours ...

Extrait :

Il lâche le contenu de sa poche-carnier sur la table. Le sac s'y écrase avec un bruit mou. Elle sursaute à la vue des abats qui ont rougi les plis du plastique, sanguinolent comme du papier de boucher.
Elle fait la grimace, repousse le sac. Il rit bêtement, s'empare des bas morceaux, les verse sur une planche de bois et entreprend de les découper en gros dés. Deux chiens lui font les yeux doux. Il leur jette des carrés de viande, qu'ils gobent d'un mouvement sec. Dans la souillards, il trouve un bidon d'huile, des sacs renforcés de farine et de sucre.
Il verse sur le métal brûlant une rasade d'huile épaisse, qui est immédiatement liquéfiée par la chaleur, jette une poignée de viande, qui se met à crépiter dans un nuage de fumée.